Au ministère de l’Intérieur, les mines sont serrées en cette fin du mois de ramadan chaude et humide. L’annonce de l’arrivée du wali Zineb El Adaoui au poste d’Inspecteur général a fait à beaucoup de hauts cadres du département, l’effet d’une grosse bouffée de chaleur. Bombardée en 2014, wali de la région Gharb Chrarda-Béni Hssen et puis wali de Souss-Massa, l’ancienne juge de la Cour des comptes n’a jamais pu se glisser dans les habits d’un « agent d’autorité ». Mais, selon plusieurs observateurs, Zineb El Adaoui n’est que l’arbre qui cache la forêt du mécontentement des cadres supérieurs du ministère de l’Intérieur. Triés sur le volet dans les facultés de droit et d’économie, formés au sein de l’Institut Royal d’Administration Territoriale de Kénitra, les « purs produits » de l’Intérieur voient l’horizon de leurs promotions bloqué.
En effet, depuis des années déjà, des profils « polytechnique et ponts et chaussées » trustent la plupart des postes importants du ministère. C’est le cas par exemple du nouveau Secrétaire général Mohamed Faouzi, lauréat de l’EMI et de l’ISCAE, du nouveau directeur des collectivités locales, diplômé de Polytechnique Paris, du directeur du Fonds d’Equipement Communal, Samir Mohamed Tazi, doublement lauréat de polytechnique et de Ponts et chaussées. Au niveau des régions, peu de cadres issus du ministère de l’Intérieur occupent aujourd’hui des « commandements ». La région de Casablanca-Settat est gérée par Abdelkbir Zahoud, diplômé de l’Ecole Hassania des travaux Publics, quant à Mohamed Mhidia, wali de la région de Rabat-Salé-Kénitra, il est titulaire de l’Ecole Nationale Supérieure de Douai. Enfin, Ahmed Hajji, wali de Souss-Massa, a lui en poche un diplôme de l’Ecole des Mines de Paris.
« Quoi de plus normal que le ministère de l’Intérieur délaisse sa propre administration et son propre institut de formation et puise dans le vivier des grandes écoles d’ingénierie françaises et marocaines, quand on sait que l’actuel ministre de l’Intérieur est lui aussi diplômé de Ponts et Chaussé et de Polytechnique », se demande un gouverneur aujourd’hui à la retraite, avant d’ajouter que le ministre délégué, Noureddine est lui aussi lauréat de l’Ecole centrale de Paris. Alors s’agit-il d’un désaveu cinglant pour la « filière interne » ou tout simplement d’un changement de vocation pour le ministère de l’Intérieur ? A part, quelques bribes de réponses décousues, la seule certitude est que « les technocrates » ont définitivement supplanté les « hommes de terroir », mettant fin au « subtile mixage » qui a subsisté jusqu’au milieu des années 2000.