Par Mohamed Foulahi
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Les manifestations qui secouent la région du Rif depuis plus de sept mois ne constituent pas une grande surprise pour la plupart des spécialistes de la gestion de l’espace public au Maroc. « Si les grandes villes comme Casablanca, Marrakech, Tanger et Agadir ont bénéficié d’un développement socio-économique indéniable au cours des dix dernières années, il n’en est pas de même pour les villes moyennes et plus petites », affirme un ministre du gouvernement El Othmani. Les statistiques récemment rendues publiques par le Haut Commissariat au Plan confirment en effet un taux de pauvreté élevé et un taux chômage supérieur à 40 % parmi les jeunes de ces villes moyennes. A Tiflet, commune de 70.000 habitants située à 65 km à l’est de Rabat, les jeunes quittent la ville très tôt, malgré un arrière-pays agricole plutôt riche. Hormis dans l’agriculture et l’administration publique, aucune carrière ne peut être envisagée par les chercheurs d’emploi, sans parler du désert culturel, le dernier cinéma a fermé ses portes il y a des années, tandis que l’activité artistique affiche un encéphalogramme plat. L’exemple de Tiflet vaut pour une soixantaine de villes du royaume de 50 à 250.000 habitants. Par le passé, les villes de Sefrou, Taza et Sidi Ifni avaient connu des émeutes violentes pour protester contre la « marginalisation » dont les populations se sentaient victimes. «Il s’agit de villes qui n’ont jamais figuré sur le tableau de bord des gouvernements qui se sont succédé depuis une trentaine d’année », explique un ancien gouverneur, « nous sommes aujourd’hui en présence de villes dortoirs sans identité, sans projets d’avenir et sans rôle à jouer dans l’espace national ». Al Hoceima ne serait que l’arbre qui cache une forêt très dense.