Rien ne prédestinait le jeune casablancais timide à être bombardé à l’âge de 45 ans, président de la Chambre des Représentants et troisième personnage politique de l’Etat marocain. Au mieux, Karim Ghellab aurait pu avoir une brillante carrière de haut commis de l’Etat dans un office ou une entreprise publique. [onlypaid] Mais sa vie va basculer quand il va croiser le chemin de Meziane Belefqih, un des hommes clé du règne de Mohammed VI, au ministère de l’Equipement. En 1998, alors directeur des Routes et de la circulation routière, Ghellab travaille sous l’œil attentif de celui qui était devenu le « chasseur de têtes » du nouveau règne. En 2001, il quitte le ministère de l’Equipement après un bras de fer mémorable avec son ministre de tutelle, l’istiqlalien Bouamar Taghouane. Ce sont en effet deux écoles et deux mentalités qui se font face. D’un côté, le lauréat des écoles françaises -bac à Lyautey et diplôme d’ingénieur à Ponts et Chaussées. De l’autre côté, un pur produit des écoles marocaines -Ecole Hassania des Travaux publics. Le ministre finit par obtenir gain de cause et Karim Ghellab s’en va pour un bref passage à l’ONA. La même année, il décroche une belle revanche. Le roi le nomme directeur général de l’ONCF, au nez et à la barbe de Bouamar Taghouane. Le 7 novembre, la revanche est une victoire écrasante. Karim Ghellab remplace Bouamar Taghouane au portefeuille de l’Equipement et s’approprie au passage le Transport. La grande surprise, c’est sa nomination en tant que ministre de l’Istiqlal, alors qu’il était connu comme beaucoup de hauts cadres marocains, pour ses sympathies de gauche. Il faut dire qu’avec Karim Ghellab, le super ministère de l’Equipement et du Transport change complètement de visage. Des chantiers voient le jour dans tout le Maroc et la cadence est accélérée. Malgré quelques couacs sur le Code de la route, le jeune ministre qui bénéficie de beaucoup d’appui en haut lieu, ratisse telle une tractopelle le terrain devant lui. La qualité de ministre technocrate peint aux couleurs partisanes à la dernière minute, ne lui plait guère. En 2003, il se présente aux élections municipales et l’emporte dans l’arrondissement de Sbata à Casablanca dont il devient président. Fort de ce succès, il se sent pousser des ailes et brigue la mairie de Casablanca. Il se fait battre par Mohamed Sajid. L’expérience est amère. Il en garde les stigmates. En 2007, il remporte à Casablanca un siège de député et accède, lors du congrès de l’Istiqlal, au comité exécutif du parti. Il y côtoie son vieil ennemi, Bouamar Taghouane. En novembre 2011, il regagne péniblement son siège de député à Casablanca. Face à la victoire islamiste du PJD, il appelle l’Istiqlal à rejoindre l’opposition et à ne pas s’allier avec Benkirane. Quelques jours après cette déclaration, un étrange retournement de situation intervient. Karim Ghellab est le candidat de la nouvelle majorité composée du PJD-Istiqlal-PPS-MP pour la présidence de la première Chambre. Après une bataille procédurale, il devient le plus jeune président du Parlement au Maroc. Une prouesse qu’il ne doit certainement pas à ses qualités de politicien ni à son parcours au sein de l’Istiqlal. [/onlypaid]