En mettant les pieds dans la région du Golfe en ces moments incertains et surtout très tendus, Mohammed VI n’a pas choisi la facilité. En prenant l’avion d’Abou Dhabi pour se rendre directement à Doha, deux capitales qui se regardent en chiens de faïence, le souverain chérifien a résolument opté pour un exercice périlleux. Il aura fallu une simple image photoshopée du roi du Maroc, arborant une écharpe à l’effigie de l’émir du Qatar dans un marché de Doha, pour mettre le feu à Twitter et à Facebook et attiser une guerre virale entre les réseaux qataris d’un côté, les réseaux émiratis et saoudiens de l’autre.
Mardi 14 novembre, une photo de Mohammed VI debout et arborant une écharpe sur laquelle est inscrit « Le monde vous appartient, nous nous avons Tamim », est largement reprise sur Twitter. Les Qataris s’en donnent à cœur de joie avec le hashtag « Bienvenu à Mohammed VI, le briseur du bloc ». Dans le camp adverse, celui des Saoudiens et des Emiratis, c’est la douche froide. En plus d’être un allié de longue date, le roi du Maroc est un « ami intime » des Al-Nahyane et des Al-Saoud, malgré quelques divergences sur certains dossiers géostratégiques. La photo serait considérée comme une grave provocation.
Alerté, le cabinet royal marocain réagit rapidement à travers le conseiller Yasser Zenagui, l’homme en charge du dossier du Golfe dans l’entourage royal. La photo serait un Fake. Un vulgaire montage qui viserait à nuire aux relations plus que cordiales qu’entretient Rabat avec Abou Dhabi et Riyad, et dans le même temps d’embarrasser Doha. Dans la foulée, le bureau de communication gouvernementale du Qatar prend le relai et confirme la version marocaine, en expliquant que le photomontage a pour objectif de faire échouer la visite de Mohammed VI à Doha.
Les deux mises au point n’ont pourtant pas calmé les réseaux sociaux dans les pays du Golfe. La polémique s’est vite transformée en une compétition ardente pour se procurer les faveurs du roi du Maroc. Il aura donc suffit d’une visite et d’une image photoshopée pour que la monarchie alaouite démontre qu’elle est un acteur diplomatique majeur dans les relations entre les monarchies du Golfe.