Par Ilyas Aribi
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Un nouvel énorme scandale de corruption est sur le point d’éclater en Algérie. Tout a commencé lorsque des cadres dirigeants de Sonatrach ont décidé de rompre le silence à propos d’un montage financier très opaque qui est en train de se mettre en place depuis plusieurs semaines autour du controversé mégaprojet de la raffinerie de Hassi Messaoud au sud du pays, le projet pétro-industriel le plus important pour l’Algérie depuis ces 20 dernières années. Selon des sources très proches de ce dossier, les deux sociétés étrangères chargées par la Sonatrach algérienne, la compagnie nationale des hydrocarbures, pour construire et livrer cette future raffinerie ont promis à leurs intermédiaires algériens de verser une commission évaluée à 80 millions de dollars US s’ils arrivent à persuader les autorités algériennes de revoir significativement à la hausse le budget final alloué par le gouvernement algérien et la Sonatrach à cette méga-raffinerie.
Il faut savoir que le contrat EPC (ingénierie, approvisionnement et construction) a été attribué en janvier 2020 à Tecnicas Reunidas et Samsung Engineering, d’une valeur de près de 3,7 milliards de dollars US. Ce marché devait être exécuté dans un délai de 52 mois dès l’entrée en vigueur du contrat. La livraison du projet était prévue en mars 2024, avec deux ans de garantie, soit mars 2026 pour la réception finale. Mais la pandémie de la COVID-19 a provoqué le gel immédiat de ce projet en 2020 et 2021. Et en 2022, lorsque la Sonatrach a voulu relancer ce projet, un conflit inattendu et violent a éclaté avec les espagnols Técnicas Reunidas. Cette dernière exige depuis 2023 une réévaluation du coût de ce marché qui obligerait les autorités algériennes ainsi que la Sonatrach à dépenser plus de 4,5 milliards de dollars US pour réceptionner et inaugurer la future raffinerie de Hassi Messaoud.
Un budget colossal qui suscite une énorme polémique au sein du régime algérien car plusieurs voix se sont élevées pour dire non à cette réévaluation voulue par la compagnie espagnole Técnicas Reunidas et les sud-coréens de Samsung Engineering. Or, ce duo a recouru à un machiavélique subterfuge pour damer le pion à l’Algérie et Sonatrach. Selon nos sources, la compagnie espagnole et le géant sud-coréen ont signé un accord écrit qui les engage à remettre une commission, en clair un pot-de-vin, d’environ 80 millions de dollars US aux intermédiaires proches du régime algérien qui pourront leur permettre de surmonter les difficultés dans les négociations autour de la hausse du coût final de la raffinerie de Hassi Messaoud. L’accord écrit imaginé par le top management de Técnicas Reunidas, attestent nos sources, contraint Samsung Engineering à verser une partie de cette commission aux proches du régime algérien.
Par ailleurs, pour justifier l’augmentation phénoménale de la valeur financière du marché de réalisation de la raffinerie Hassi Messaoud, les espagnols de Técnicas Reunidas ont concédé à Samsung Engineering la partie la plus onéreuse du projet, à savoir l’achat et l’acquisition du matériel de production nécessaire à la mise en service des installations de la raffinerie provoquant ainsi une importante surfacturation qui met énormément Sonatrach dans l’embarras.
D’autre part, pour contourner les règles prudentielles en matière de surveillance et de lutte contre les pratiques de corruption auxquelles sont soumises dans leurs pays respectifs les compagnies européennes et occidentales comme Técnicas Reunidas, les espagnols et leurs partenaires sud-coréens ont demandé à leurs « intermédiaires algériens » qui convoitent cette commission de 80 millions de dollars US de persuader les autorités algériennes ainsi que la Sonatrach de valider une proposition inédite et dangereuse : prendre une compagnie chinoise comme principal sous-traitant dans la réalisation de la future raffinerie de Hassi Messaoud.
Cette compagnie chinoise est la célèbre SINOPEC, une des plus importantes Sociétés pétrolières et chimiques de Chine,qui entretient d’excellentes connexions avec les dirigeants algériens. La compagnie chinoise n’est pas soumise aux règles d’éthique de lutte contre la corruption et la remise de pots-de-vin pour l’obtention de marchés stratégiques à l’étranger comme c’est le cas pour les entreprises occidentales.
Selon nos sources, les chinois de SINOPEC seront associés par les espagnols et sud-coréens à ce projet de la raffinerie de Hassi Messaoud pour pouvoir verser, par la suite, la fameuse commission de 80 millions de dollars US aux dirigeants véreux qui seront corrompus pour faire aboutir les intérêts occultes étrangers autour de ce mégaprojet pétrochimique. Nous poursuivons notre enquête sur ce dossier classé comme sensible par les autorités algériennes et nous ferons prochainement des révélations détaillées sur les identités des intermédiaires et lobbyistes mobilisés par Técnicas Reunidas et Samsung Engineering pour corrompre les dirigeants algériens et faire grimper le marché de la réalisation de la raffinerie de Hassi Messaoud jusqu’à plus de 4,5 milliards de dollars US. A suivre…