Par Jérôme Galveli
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Entre Ankara et Alger, les relations ne sont pas aussi affectueuses, amicales et chaleureuses comme le décrivent dans leur discours officiel les dirigeants algériens. Entre les deux pays, il y a des dossiers chauds dans lesquels des désaccords importants nourrissent des tensions et des frustrations notamment du côté turc. Et pour cause, depuis 2022, Recep Tayeb Erdogan ne cesse d’exercer des pressions sur son le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour obtenir la tête de certaines hommes d’affaires opposants qui font des affaires juteuses en Algérie alors qu’ils sont affiliés à des mouvements de l’opposition turque exilée à l’étranger.
Il s’agit d’un dossier très discret et extrêmement peu médiatisé en raison de ses enjeux délicats. Ankara ne cesse de demander à Alger l’extradition des proches du milliardaire turc Yunus Dogan, installé au Texas, qui mènent plusieurs activités économiques juteuses en Algérie notamment dans le domaine de la construction et l’agriculture. Cet homme d’affaires turco-américain est réputé soutenir l’imam Fethullah Gülen, bête noire de Recep Tayyip Erdogan.
Le 4 mars 2022, Yunus Dogan, en sa qualité président de l’US-Algeria Business Council (USABC), s’est affiché en compagnie d’Ahmed Boutache, l’ancien ambassadeur d’Algérie aux Etats-Unis et d’Ismail Chikhoine, le directeur de l’USABC. Cette proximité n’a pas manqué de susciter la colère d’Ankara qui a relancé sa demande d’extradition ciblant le beau-fils de Yunus Dogan, et le principal gestionnaire de son business en Algérie, Yilmaz Barin qui dirige la plus importante entreprise turque de construction en Algérie : Atlas Génie Civil en charge de la réalisation de plusieurs milliers de logements sociaux ou locatifs au profit de l’Etat algérien en bénéficiant de commandes publiques évaluées à près de 100 millions de dollars USD.
En Algérie, le développement du business de ces opposants turcs diabolisés par Erdogan dérange fortement Ankara. Selon nos sources, Alger a promis d’étudier soigneusement et sérieusement les demandes judiciaires qui lui ont été communiquées par les magistrats turcs. Mais pour l’heure, Yilmaz Barin et ses collaborateurs ainsi que les proches de Yunus Dogan en Algérie demeurent protégés car ils ont noué des deals de business avec de nombreux dirigeants très puissants au sein du clan Tebboune. Les abandonner ne semble pas encore une option envisageable pour le régime algérien et même si cette attitude déplait et déçoit « l’ami Erdogan ».