Le discours du roi Mohammed VI n’a pas laissé les dirigeants algériens indifférents. Bien au contraire, de nombreuses personnalités politiques ont suivi attentivement le discours du monarque marocain. [onlypaid]
Du palais d’El Mouradia jusqu’au siège du parti d’Ouyahia, le RND, ou le FLN de Belkhadem, les acteurs de la scène politique algérienne avaient, vendredi soir, les yeux rivés sur leurs postes de télévision, selon des informations que nous avons pu recueillir. Et même au sein des institutions militaires, on prenait note et on analysait les tenants et les aboutissants des mesures annoncées par Mohamed VI. Ceci dit, les interprétations ont divergé et aucune position commune ne s’est dessinée à Alger. Et pour cause, si au palais d’El Mouradia, les conseillers de Bouteflika ont salué les démarches du roi du Maroc qui ont été globalement bien accueillies, d’autres chapelles politiques ont exprimé leurs craintes. Ainsi, pour le clan présidentiel, la démarche de Mohammed VI ressemble beaucoup à celle adoptée par le président Abdelaziz Bouteflika. Les deux dirigeants cherchent à ouvrir le champ politique à la société civile pour éviter une éventuelle crise. «Dans ce sens, Alger espère bien que ces réformes fonctionnent au Maroc. Cela sera un bon argument pour expliquer ceci aux Algériens : voila, comme chez nos voisins, on peut changer les choses par étapes en évitant de trop bousculer les données rapidement», note un conseiller à la présidence. Néanmoins, l’officialisation de la langue Amazighe n’a pas inspiré confiance aux partisans de Bouteflika. «La présidence craint effectivement que la décision du palais royal ne relance la lutte identitaire en Algérie. Il serait dangereux qu’aux mouvements sociaux déjà très intenses en Algérie, viennent se greffer des revendications identitaires mêmes si elles sont légitimes», analyse un observateur averti à Alger. D’autres interlocuteurs proches de la présidence ont fait remarquer que les islamistes, avec lesquels Bouteflika veut se lier pour contrecarrer le clan des militaires, menaceraient de retirer leur soutien si des berbéristes trouvent une oreille attentive à El Mouradia.
En revanche, du côté d’Ouyahia et ses protecteurs militaires, le référendum marocain sur la nouvelle Constitution n’inspire aucune sérénité. Les intérêts d’Ouyahia et de ses « maîtres », qui ont déjà torpillé les efforts de rapprochement avec le Maroc entamés par Bouteflika, seront menacés par un climat démocratique chez le voisin, soulignent des sources dignes de foi. «Si le référendum au Maroc attire les foules et les réformes suivent leur chemin, cela donnera du crédit aux démarches de Bouteflika qui veut à tout prix mettre à la porte Ouyahia et sa formation managée par les militaires », explique un diplomate français en poste à Alger. «C’est un scénario que le DRS n’accepterait jamais. C’est pour cela que ses responsables font tout pour ne pas perdre la main sur le processus de réformes enclenché par Bouteflika. Mais si une démocratie parlementaire s’installe au Maroc, cela donnera des idées aux Algériens, et le DRS ne souhaite surtout pas être entouré par des pays voisins lancés sur la voie de la démocratie», explique enfin un ancien cadre des services de renseignements algériens installé aujourd’hui à Paris. [/onlypaid]