Par Jérôme Galveli
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Le malaise est énorme à Alger notamment au sein des services de renseignement qui se sentent totalement désabusés, dépassés et « largués » dans le dossier malien. Et pour cause, les récents développements militaires sur le front du Nord du Mali ont porté un énorme coup fatal à la crédibilité de l’Algérie. Les forces de l’Armée malienne a pu reprendre avec brio la grande et stratégique ville du nord du pays, Kidal, cœur battant de la communauté touarègue et l’une des cités du désert les plus proches des frontières algériennes.
Le 14 novembre dernier, les forces armées maliennes ont pu reprendre Kidal, le bastion de la rébellion touareg, enterrant ainsi définitivement tout espoir de l’application de l’accord de paix conclu à Alger en 2015 avec les différentes factions armées du mouvement indépendantiste de l’Azawad. La victoire militaire de l’armée malienne a été rendue possible uniquement grâce à l’appui militaire, logistique et financier de la Russie à travers le groupe paramilitaire Wagner. Cependant, les autorités russes n’ont nullement associé l’Algérie à ce processus d’intervention militaire au nord du Mali. Moscou n’a même pas pris la peine d’alerter, d’informer ou de se concerter avec Alger au sujet des tenants et aboutissants réels de cette opération militaire malienne qui a permis la conquête du nord du pays des mains des rebelles touaregs.
Les partenaires russes n’ont pas jugé utile d’associer leurs homologues algériens ni de les consulter lorsque cette opération de reconquête a été lancée sous l’égide des officiers du groupe Wagner. Les services secrets algériens avaient, pourtant, des informations sur la présence forte des forces de Wagner dans les rangs des forces militaires maliennes, mais ils n’avaient pas imaginé que les russes s’étaient engagés pour parrainer la reprise du contrôle de Kidal sans demander l’intervention ou l’avis de l’Algérie qui est l’interlocutrice attirée de plusieurs groupes membres du Cadre stratégique permanent (CSP), une alliance de groupes armés touaregs. Les dirigeants algériens espéraient au moins une sollicitation de Moscou pour intervenir auprès des groupes armés touaregs afin de négocier avec eux un compromis empêchant la poursuite des combats contre les forces maliennes au sein de Kidal.
Visiblement, les partenaires russes ont voulu « faire cavalier seul » préférant contourner l’Algérie et s’imposer comme les vrais nouveaux maîtres du Sahel. Cette attitude a fortement déplu à Alger et le président algérien Abdelmadjid Tebboune a été pressé par des rapports des services algériens de réclamer des explications à Moscou alors qu’à Bamako, la junte au pouvoir refuse d’échanger avec les autorités algériennes au sujet de la question de la sécurité au nord du Mali estimant qu’elle relève, désormais, de sa souveraineté nationale. Exit donc l’influence de l’Algérie qui doit donc oublier son rôle historique d’arbitre respecté, écouté et considéré par toutes les parties du conflit malien.