A Alger ces dernières 48 heures la situation était devenue intenable. La guerre entre les différents clans a redoublé d’intensité. Et parfois elle faisait rage au sein du même clan. Les informations recoupées auprès des places financières internationales faisaient état d’un véritable « saignée » de capitaux vers Dubaï, l’Espagne, la Turquie et certains paradis fiscaux. Et pour ne rien arranger, le nouveau premier ministre nommé Noureddine Bedoui s’est révélé incapable de constituer un gouvernement de « compétences nationales ». Au même moment, la rue continuait à réclamer le départ immédiat du président Abdelaziz Bouteflika et de tout le système. « Le pouvoir algérien renvoyait à la face du monde un image archaïque, sclérosée, catastrophique en déphasage total avec la vitalité et la modernité des manifestants », reconnait un ministre sortant.
Mais, ce qui inquiétait surtout, c’était la menace de la désintégration de tout le système, explique un diplomate européen en poste à Alger. « Depuis une semaine, ça tire dans tous les sens au milieu d’une dangereuse cacophonie », insiste ce diplomate. Il faut dire qu’aucune sortie de crise n’a plus été proposée par le pouvoir, depuis que la feuille de route présentée par Abdelaziz Bouteflika a été massivement rejetée. Cette situation a poussé plusieurs personnalités à demander à l’armée de « prendre ses responsabilités ». Et c’est justement pour sauver le système dont il est l’un des principaux piliers que le général Ahmed Gaïd Salah a pris les devants en sacrifiant un président envers lequel il était demeuré fidèle jusqu’ici. « C’était ça ou la contestation risquait d’atteindre la grande muette dont les jeunes cadres sont très impressionnés par le mouvement de la rue », croit savoir un général de l’APN aujourd’hui à la retraite.
En demandant d’enclencher la procédure d’empêchement contre le président Abdelaziz Bouteflika, le général Gaïd Salah donne une véritable bouffée d’oxygène à un « système au bord de l’asphyxie ». Les quatre prochains mois de délai avant les prochaines élections prévues par la constitution serviront certainement aux ailes du pouvoir de s’étendre sur une nouvelle feuille de route. A moins que le peuple ne soit d’un autre avis.