Toute l’Algérie retient son souffle. Après la vague de limogeages qui a frappé de plein fouet le monde sécuritaire que sont la police, la gendarmerie et l’institution militaire dans ses diverses directions comme les régions militaires, un prochain changement de gouvernement devient désormais l’étape cruciale qui doit marquer la rentrée sociale. Un changement très attendu censé faire repartir la machine rouillée de l’Etat dans un contexte de forte agitation sociale et économique. Un changement important puisque le futur gouvernement doit rassurer l’Algérie et donner des réponses à sa population à la veille d’une élection présidentielle, prévue en avril 2019, et qui promet d’être haletante.
Or tout dépend aujourd’hui plus que jamais du résultat d’un match décisif qui se joue au sommet de l’Etat algérien. Il oppose Noureddine Bedoui, ministre de l’Intérieur, à Ahmed Ouyahia, Premier ministre. Le premier est pressenti pour remplacer le second. Mais le second est en train de se défendre et manoeuvre pour ne pas céder sa place au premier. Selon nos sources, tout a commencé lorsque Noureddine Bedoui a été reçu à deux reprises depuis le début de cet été à la résidence présidentielle de Zéralda, où séjourne le Président Abdelaziz Bouteflika. Ses conseillers les plus proches et fidèles y travaillent.
Selon ces mêmes sources, il s’agit bel et bien d’une sorte « d’entretien d’embauche » destiné à sonder les intentions et les capacités de Bedoui qui bénéficie d’une grande attention et d’une tout aussi grande confiance de la part du cercle présidentiel. Mais l’homme garde la tête froid et conserve les pieds sur terre. A 58 ans, il connaît sur le bout des ongles le régime qu’il sert depuis de longues années, années au cours desquelles il a occupé les fonctions de magistrat et wali de plusieurs wilayas. Bedoui sait comme personne qu’il ne faut jamais montrer les dents en Algérie. Sa vigilance n’a fait que redoubler depuis qu’il est l’objet d’une véritable tentative de déstabilisation de la part du clan Ouyahia.
Ahmed Ouyahia veut rester aux manettes du gouvernement. Partir maintenant est préjudiciable pour sa carrière. Il ne risque pas de pouvoir retourner au Palais d’El-Mouradia pour retrouver son poste d’antan de chef de cabinet de la présidence. Et comme il ne peut pas s’aventurer à briguer la magistrature suprême alors que le président Bouteflika est toujours en vie et au pouvoir, Ahmed Ouyahia sait pertinemment qu’une sortie du pouvoir maintenant est très dangereuse, notamment avant le début réglementaire de la campagne électorale pour les élections présidentielles d’avril 2019.
Et pour rester, il faut résister à la concurrence. Et donner des coups avant d’en recevoir. Ouyahia commence d’abord par boycotter les sorties sur le terrain où Bedoui est présent. Lors de l’Aid El-fitr, il ne veut pas s’afficher avec Bedoui qui rend visite aux centres des personnes âgées et abandonnées. Il fait pression pour que plusieurs ministres ne l’accompagnent pas. Sur les sujets les plus sensibles, il laisse Bedoui se griller tout seul comme lorsqu’il est parti au sud du pays au moment en pleines contestations sociales pour réclamer des droits sociaux et de meilleures conditions de vie.
Par conséquent, un véritable climat de tension règne au sein du gouvernement et la zizanie divise les pro-Ouyahia et les proches de Bedoui. Le ministre de l’Intérieur se plaint et saisit des personnalités influentes pour dénoncer une « compétition déloyale ». Les partisans d’Ahmed Ouyahia en profitent pour tenter de convaincre d’inclure Bedoui sur la liste des ministres partants ou de lui changer de poste au sein du régime en raison de ses ambitions gênantes qui peuvent déstabiliser la cohésion du gouvernement.
Le match n’est pas encore terminé. Et seul le locataire de la résidence présidentielle de Zéralda peut donner le coup de sifflet final et désigner le vainqueur. Le verdict ne devrait pas tarder, assurent nos sources. Mais de cette lutte acharnée, les deux hommes risquent d’y laisser des plumes…
LES LOUPS NE SE MANGENT PAS ENTRE EUX
Vous oubliez gaid salah