Depuis l’annonce de la cession par Saham Finances de son pôle Assurances au géant Sud-Africain Sanlam, les rumeurs les plus insensées n’ont cessé d’alimenter les réseaux sociaux, encouragées par des articles annonçant l’annulation de ce que la presse marocaine a qualifié de « deal du siècle ».
Le montant de la transaction, plus d’un milliard de dollars, est en effet sans précédent dans les annales des cessions d’entreprises marocaines, et a de quoi nourrir tous les fantasmes. La nature de l’entreprise, propriété de Moulay Hafid Elalamy, l’un des ministres les plus en vue du gouvernement chérifien, a rajoute également à cette ambiance « médiatiquement malsaine » qui a accompagné ce deal.
« S’il est tout à fait normal que les réseaux sociaux s’enflamment à l’annonce du chiffre astronomique de la vente, il est par contre bizarre que certains articles aient été soufflés par des cercles bien connus par leur hostilité au ministre de l’Industrie et du Commerce », confie à Maghreb Intelligence un des dirigeants d’une des grandes banques casablancaises. En effet, dans une ambiance économique délétère où trois entreprises, et non des moindres, subissent de plein fouet une large campagne de boycott, il est facile de désigner une autre « victime » en usant de « manipulations et de subterfuges » les plus divers.
Ainsi, la première salve tirée contre le deal Saham-Sanlam a porté sur un hypothétique refus par l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale -ACAPS- de cette vente. Pour le moment, et malgré un certain retard dans l’instruction de ce dossier dû principalement au fonctionnement interne de l’ACAPS, peu habituée à traiter des deals de cette importance, cette autorité qui dépend du ministère des Finances n’a à aucun moment signifier un quelconque refus de ce dossier.
Autre grief reproché à la transaction Saham-Sanlam, et qui contre toute attente a été relayé dans la presse par des conseillers de la CGEM siégeant à la deuxième chambre du parlement, portait sur le paiement du droit d’enregistrement. A la recherche d’un improbable scandale fiscal, des informations ont imputé au couple Boussaid-Elalamy la volonté de gruger l’Etat de 400 millions de dirhams de recettes fiscales. Une disposition introduite dans la dernière loi des Finances exonère les opérations de cession des 4 % des droits d’enregistrements. « C’est fallacieux comme argument », s’emporte un membre de l’équipe sortante de la CGEM. « C’est nous-même à la CGEM qui avons, dans le cadre de la promotion de l’investissement, demandé au gouvernement l’exonération des droits d’enregistrement sur les cessions d’actions et parts sociales », ajoute notre interlocuteur qui se réfère à la déclaration faite, le 24 septembre 2017 à Média24, par Abdelkader Boukhris, président de la commission fiscale et réglementation des changes à la CGEM. (https://www.medias24.com/MAROC/ECONOMIE/176680-PLF2018.-Voici-le-detail-des-propositions-de-la-CGEM.html). D’ailleurs, dans les documents officiels de la CGEM, les 4 % de droits d’enregistrements sont considérés comme une taxe qui pénalise l’investissement.
Par ailleurs et dans la même veine, le Conseil Economique, Social et Environnemental dans l’une de ses publications intitulée « Système fiscal marocain : développement économique et cohésion sociale » avait présenté un benchmark relatif aux droits d’enregistrements en Europe et dans les pays de la région. Il en ressort qu’en France ils sont seulement de 0,1 %, alors qu’en Tunisie, les opérateurs s’acquittent de 450 dirhams quel que soit le montant de la transaction.
En outre, la suppression de ces droits d’enregistrements figure également dans les recommandations des Assises de la fiscalité qui se sont tenues le 29 et 30 avril 2013 à Skhirat.
Du côté de Saham Finances, l’optimisme est de mise. « En opérant un tel deal, nous nous attendions à des attaques de toutes parts. Nous gardons notre cap et nous avons confiance dans l’ACAPS », nous affirme un membre du staff dirigeant du mastodonte casablancaise. « C’est un deal purement financier comme il y en a chaque jour dans le monde de la finance internationale et il ne revêt aucune portée ni politique ni diplomatique et ceux qui soutiennent le contraire nuisent à l’image du royaume », rappelle ce dirigeant de Saham Finances.