« Ils se sont fait avoir comme des bleus », tonne cet ancien correspondant d’un quotidien espagnol à Rabat. Le journaliste parlait des quotidiens espagnols El Mundo et El Pais qui, dès le lundi à midi,
évoquaient l’existence de plusieurs morts parmi les populations civiles lors du démantèlement du camp de Gdem Izik près de Lâyoune. En effet, El Mundo a commencé par balancer sur son site web le chiffre de 13 morts en citant des « activistes pro Polisario ». Une heure après, c’est le prestigieux El Pais qui parle lui de 7 morts, toujours des civils. En fin de journée, alors que les seuls morts qu’on comptait étaient dans les rangs des forces de sécurité marocaines, les deux quotidiens ibériques revenaient au chiffre plus modique de 1 mort et, cette fois, en y mettant le conditionnel. Dans la rédaction des deux quotidiens, le malaise était grand. Plusieurs journalistes, même ceux qui n’aiment pas le Maroc pour une raison ou une autre, parlent de dérapages. « Aucune précaution n’a été prise lors de la diffusion des informations. Tout ce qui nous arrivaient de Tindouf ou encore d’activistes anonymes était pris pour de l’argent comptant », proteste un journaliste espagnol. Aujourd’hui, le débat sur les sources d’information concernant le conflit du Sahara fait rage. Une infime minorité de journalistes espagnoles prône une distance raisonnable avec le sujet « Maroc », alors que l’écrasante majorité continue à snober les « informations officielles marocaines » quel que soit leur degré de fiabilité. « Les médias espagnols dans leur traitement du Maroc préfèrent le sensationnalisme au professionnalisme. Ceci remonte à la guerre de colonisation où les journaux de l’époque racontaient tout et n’importe quoi de ce peuple primitif qui infligeait de sérieuses pertes aux valeureux guerriers chrétiens. Même maintenant, l’information Maroc est dramatisée, romancée et largement caricaturée », explique un journaliste espagnol établi à Rabat depuis des années. Le problème, c’est que cette perception du Maroc n’a pas trop changé et, si on y ajoute un peu de mauvaise foi, l’on pourrait facilement parler de syndrome de Timisoara ».