Décidément le Maroc change à grande vitesse. Le gouvernement -avec à sa tête le tonitruant Abdelilah Benkirane, habitué à en découdre souvent en des termes peu amènes avec les parlementaires- vient de fumer le calumet de la paix avec le président de la Chambre des Représentants, l’amorphe Istiqlalien Karim Ghellab. Le sujet de l’entente est la rédaction d’un communiqué conjoint entre la primature et la présidence du parlement présentant officiellement les excuses les plus plates du gouvernement au député du PJD, Abdessamad El Iddrissi, « bousculé » par les forces de l’ordre lors de la dispersion, le 28 décembre dernier, d’une manifestation non autorisée devant l’enceinte du parlement. L’affaire, qui aurait du relever de l’anecdote, est devenue quelques semaines après une véritable affaire d’Etat. Le groupe parlementaire est monté au créneau criant au scandale et exigeant des excuses officielles de la police qui aurait sciemment « agressée » Abdessamad El Idrissi. Ce qui est étonnant dans cette affaire, ce n’est pas tant la position du député du PJD et de ses confrères appartenant au même parti, mais celle du président de la Chambre des représentants, du Chef du gouvernement et du ministre de l’Intérieur. D’après certains observateurs, ces derniers, au lieu de raisonner le député en question et de défendre les forces de l’ordre qui ne faisaient que leur devoir en libérant l’espace publique d’une occupation illégale, se sont empressés de « baisser le pantalon » devant la véhémence des pistoleros islamistes.
En effet, depuis une dizaine d’années, les manifestants ont l’habitude d’occuper le centre de la capitale marocaine. Les forces de l’ordre les dispersent à chaque fois qu’ils bloquent la circulation. Jamais par le passé ni le PJD ni ses dirigeants n’avaient trouvé rien à redire. Aujourd’hui, en s’en prenant aux forces de police, Abessamad El Idrissi est en train de mener un combat seulement et uniquement pour sa seule personne. L’élu islamiste se soucie peu du sort des manifestants « matraqués ». Il veut juste sauver son honneur de député, au détriment de celui des manifestants-relégués au rôle de comparses ou de faire-valoir- et des policiers jetés en pâture à l’opinion publique. « Là où le bas blesse, c’est que Benkirane, Laenser et Ghellab reculent par purs calculs politiciens devant une grosse gueule qui débute en politique. Cela augure mal du futur », avoue un ancien ministre du gouvernement El Youssoufi, avant d’ajouter, amer « Le député du PJD n’avait pas à entraver le travail des forces de l’ordre. Sa place est dans l’hémicycle et non à jouer les rambos pour des causes perdues d’avance ». D’après les observateurs, le PJD serait en train de se mettre toute l’administration sur le dos en laissant libre court aux « maladresses » de ses députés.
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