C’est un véritable coup de tonnerre qui s’est abattu sur l’enceinte du parlement marocain lorsque le député du Parti Authenticité et Modernité (PAM), Mohamed Boudra – qui est aussi président de la région Taza-Al Hoceima-Taounat- s’en est pris aux Forces Armées Royales (FAR) en des termes très violents sous les yeux ahuris d’Abdellatif Loudiyi, ministre délégué en charge de l’administration de la Défense nationale. Les députés présents à la commission des Affaires étrangères, de la Défense, des Affaires Islamiques et des Marocains Résidents à l’Etranger qui débattaient le projet de Loi sur l’immunité des militaires n’en ont pas cru leurs oreilles lorsque Mohamed Boudra a accusé les Forces Armées Royales d’avoir «violé des femmes, brûlé des champs et arrêté des gens illégalement » lors des événements du Rif en 1958 et 1959. L’élu rifain, un transfuge du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS), ne s’est pas arrêté là. Il a enfoncé le clou en rappelant que « l’institution militaire a commis de graves violations des droits de l’homme » pendant ce qui fut appelé par la presse internationale « la révolte » du Rif en référence aux confrontations armées entre la jeune armée marocaine conduite par le roi Hassan II et des rebelles du Rif. C’est la première fois, depuis plus d’une trentaine d’années, que les Forces Armées Royales font l’objet de vives critiques, notamment de la part d’un membre d’un parti politique présent au parlement. En effet, l’institution militaire a toujours fait l’objet d’un large consensus au sein de la classe politique marocaine. Dans la même réunion, Abdellatif Ouahbi, président du groupe du PAM dans la Chambre des Représentants a essayé de tempérer les propos de son collègue, mais il n’est pas dit que Mohamed Boudra n’ait pas franchi dans ses déclarations un seuil jugé « sensible » par l’ensemble des politiciens marocains. « On peut discuter de tout au sein du parlement, mais revenir aussi crûment sur des événements que l’Instance Equité et Réconciliation avait déjà épuré est maladroit et dangereux », affirme un député de l’USFP pourtant très critique envers le projet d’immunité pénale des militaires.