C’est un scandale aux allures de cataclysme qui vient terrasser ces derniers jours un tennis marocain agonisant depuis des années. Sept parmi les meilleurs jeunes joueurs du tennis marocain viennent d’écoper d’une suspension allant de 7 années jusqu’à une radiation à vie de toutes les compétitions nationales et internationales par l’Agence Internationale pour l’Intégrité du Tennis (ITIA). Ce qui signifie la fin de carrières tennistiques pourtant prometteuses.
Le juge anti corruption indépendant Charles Hollander, qui a instruit l’affaire pendant plusieurs années, a conclu que Amine Ahouda, Anas Chakrouni, Ayoub Chakrouni, Mohamed Zakaria Khalil, Soufiane El Mesbahi, Yassir Kilani se sont rendus coupables de plusieurs infractions et de divers chefs d’accusation de trucage de matchs, tels que « le trucage d’éléments de matchs, la réception d’argent pour le trucage et le défaut de signaler des approches corrompues ».
De jeunes tennismans bannis…définitivement
Des infractions aux règles du Tennis Anti-Corruption Program (TACP) qui forcent les jeunes tennismans marocains à raccrocher leurs raquettes définitivement, après une radiation, celle-ci à vie, prononcée il y quelques mois à l’encontre d’un autre joueur marocain, et ce pour les mêmes motifs.
La sanction de l’ITIA pénalise surtout les trois derniers joueurs marocains cités qui poursuivent, d’ailleurs grâce au tennis, des études dans supérieures dans des universités américaines. Le trio risque gros au regard des critères d’admission dans le système universitaire américain. Zakaria Khalil, Soufiane El Mesbahi, Yassir Kilani en plus d’avoir perdu leurs carrières sur les courts de tennis, risquent maintenant de voir tomber à l’eau leur avenir professionnel.
Mais, revenons quelques années en arrière, au début de cette affaire.
La Fédération Royale Marocaine de Tennis avait adopté comme stratégie sportive d’envoyer les meilleurs jeunes espoirs marocains qui ont entre 12 et 17 ans participer dans des tournois de jeunes en Afrique, principalement en Tunisie où ces tournois sont nombreux. La plupart de ces jeunes ont été formés par leurs clubs et le coût de leurs formations a été exclusivement supporté par les parents.
Ce sont donc des joueurs mineurs, comme l’a affirmé maître Karim Adyel, avocat de trois d’entre eux, qui ont été accompagnés dans ces tournois par des cadres de la FRMT qui les entraînaient et veillaient sur leur alimentation, leur bien-être physique et moral et qui étaient supposés les protéger.
C’est donc dans ce cadre-là que les joueurs bannis auraient succombé à la tentation de l’argent facile à travers le trucage des matchs accompagnés de paris sur des sites sportifs effectués par des complices. L’arnaque est connue dans le milieu du tennis et a pris une ampleur importante depuis l’avènement d’internet et des sites de paris sportifs.
Où est passée la FRMT ?
A ce propos, des questions s’imposent. Les joueurs, censés être encadrés par la FRMT ont-ils été prévenus des dangers de ces pratiques ? Quels rôles ont joué les encadreurs et autres entraîneurs dans ces affaires louches ? La Fédération a-t-elle menée une enquête interne et auprès des clubs formateurs ? La Fédération, si enquête a été menée, a-t-elle publié des conclusions ?
Ces questions restent aujourd’hui sans aucune réponse au moment où la réputation du tennis marocain se trouve ternie. Des parents éplorés, ayant sacrifié leur temps et beaucoup de leur argent, n’hésitent plus à crier publiquement leur désarroi et leur détresse. Dans ce sport qui coûte cher, tout est à la charge des parents qui continuent à payer des cotisations aux clubs même quand leurs enfants représentent le Maroc dans les championnats arabes et africains de tennis.
Ce scandale n’est que l’arbre qui cache une forêt pourrie dont les arbres tombent les uns après les autres. D’après plusieurs cadres du tennis marocains, il y a aujourd’hui quelque chose de malsain dans le tennis marocain ces dix dernières années.
Bilan catastrophique pour le tennis marocain
Et pour preuve. Plus aucun joueur marocain ne figure dans les 100 premiers depuis des lustres. Absence de courts en dur, alors que les ¾ des tournois à travers le monde se jouent sur cette surface. Une direction technique confiée à un simple moniteur, nommé pour complaisance avec la fédération, alors que nos meilleurs profils monnaient leurs talents à l’étranger (France, Qatar). Déculottées à répétition dans la Coupe Davis où l’équipe nationale du Maroc stagne loin du Groupe 1 mondial. Absence d’un centre national de tennis au moment où le complexe A Amal, bâti parle visionnaire feu Mohamed Mjid, est laissé en jachère par une fédération insoucieuse. Enfin, et c’est ce qui fait le succès de tous les pays où le tennis rayonne, aucun projet sport-étude sérieux n’a été mis en place…
Un bilan triste pour un Fédération Royale Marocaine de Tennis, déconnectée de la réalité, qui s’entête à amasser des titres arabes et africains dans les catégories de jeunes au lieu d’aller challenger es meilleurs nations du tennis mondial.