Dans ses bureaux de la Fécafoot (fédération camerounaise de football) où il s’est nouvellement installé, le nouveau président Samuel Eto’o tourne comme un lion « indomptable » en cage. L’ancien joyau du football mondial, reconverti en gestionnaire du ballon rond camerounais, a pour première mission de réussir l’organisation de la prochaine Coupe d’Afrique des Nation qui aura lieu dans son pays du 9 janvier au 6 février. Sauf qu’un autre, le super-puissant patron de la FIFA ne l’entend pas de cette oreille. Gianni Infantino, sous la pression des clubs européens employeurs des principales stars africaines, voudrait coûte que coûte reporter la compétition panafricaine.
Seule habilitée à décaler les dates de la CAN, la Confédération Africaine de Football ne se prononce pas…ou du moins pas officiellement. Dans les coulisses, deux membres du comité exécutif jouent les missi dominici auprès de leurs pairs afin de reporter la prestigieuse compétition panafricaine. L’égyptien Hani Abo Rida et le marocain Faouzi Lekjaâ, siégeant tous les deux par ailleurs au Conseil de la FIFA et réputés être très proches de Gianni Infantino, contactent un à un les membres du comité exécutif de la CAF.
D’après une source de la Confédération africaine qui a voulu parler à Maghreb-intelligence, c’est le marocain Faouzi Lekjaâ qui se montre le plus entreprenant. L’information arrive rapidement aux oreilles de Samuel Eto’o qui s’empresse de prendre son téléphone et appeler ses amis au sein des fédérations nationales du continent, ainsi que le président de la CAF. La source de Maghreb-intelligence affirme que l’ancien ballon d’or n’hésite pas à pointer du doigt Faouzi Lekjaâ qu’il accuse de rouler pour Gianni Infantino au dépend des intérêts de l’Afrique qu’il représente pourtant à la FIFA. L’argument semble faire mouche, puisque plusieurs dirigeants du football africain donnent raison à Samuel Eto’o. Dans le match qui oppose désormais le Camerounais et le Marocain, c’est le goleador camerounais, véritable renard des surfaces, qui marque le premier but au marocain.
Mais ce dernier reste imperturbable. Soucieux de gérer sa carrière et de plaire au patron de la FIFA, il continue à œuvrer en coulisses pour le report de la CAN, affirme à Maghreb-intelligence un membre de la fédération panafricaine. De son côté, Eto’o choisit de taper haut et fort. Il se plaint aux autorités de son pays du comportement « franchement hostile » du Marocain. L’affaire prend une tournure diplomatique. Yaoundé qui était depuis toujours un fidèle soutien de Rabat dans l’affaire du Sahara occidental est fâché. Officieusement, les autorités marocaines font savoir à leurs homologues camerounaises qu’elles n’ont rien contre l’organisation de la CAN aux dates initialement prévues. Face à un Faouzi Lekjaâ en méforme, Samuel Eto’o double la marque.
Le dimanche 19 décembre dans la soirée, lors d’une réunion en visio-conférence du comité exécutif de la CAF, le vent tourne définitivement en faveur du président de la Fécafoot. Les voix contre l’organisation de la compétition sont rares et molles. Patrice Motsepe, président de la confédération africaine de football prend acte et s’envole dès le lendemain lundi 20 décembre vers Yaoundé. Hat-Trick de Samuel Eto’o. Le Camerounais renforce son avance.
Dans la capitale Yaoundé, c’est la joie. Le pays va abriter sa Coupe d’Afrique des Nations. Celle pour laquelle il a consenti depuis des années beaucoup de sacrifices financiers. Patrice Motsepe, conciliateur, lance devant les journalistes et les officiels camerounais que leur pays a « réussi son pari ». Une sacrée claque pour Infantino. Avec le président Paul Biya, il a évoqué le « très bon travail qui a été fait pour accueillir une CAN qui rendra le peuple du Cameroun fier, qui rendra le peuple d’Afrique fier ». Une monumentale gifle pour Faouzi Lekjaâ. Au tableau d’affichage, le canonnier camerounais mène 4-0. En pleine déconfiture, le patron du football marocain a les jambes sciées.
Il n’en reste pas moins que les positions de Faouzi Lekjaâ ont ébréché la solide amitié entre Rabat et Yaoundé. Le très médiatisé président de la Fédération Royal Marocaine de Football représente-il aujourd’hui les intérêts de son pays où est-il, comme le disent certains, en roue libre ?