On ne s’ennuie jamais en Tunisie, où le président de la République et le chef du gouvernement enchaînent les démonstrations de force dans un éternel bras de fer, stérile, au sommet de l’État.
Quelques jours après la fameuse déclaration de Kaïs Saïed, “je suis le commandant suprême de toutes les forces armées” (civile et militaire), Hichem Mechichi, également ministre de l’Intérieur par intérim, s’est offert une riposte de poids pour recadrer sèchement le locataire de Carthage. L’homme fort du mouvement Ennahda a nommé Lazhar Longou à la tête des services spéciaux.
Longou était à l’origine du limogeage – en janvier dernier – de l’ancien ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine parti en guerre contre les responsables sécuritaires islamistes corrompus. Proche du chef de l’État, Charfeddine avait été informé de son éviction après avoir mis fin aux fonctions de Lazhar Longou, chef de l’antenne du ministère de l’Intérieur à Paris.
Le nouveau directeur général des services spéciaux, un élément protégé par Rached Ghanouchi, serait aussi membre de l’organe sécuritaire secret d’Ennahdha, démystifié il y a quelque temps. Longou faisait partie des responsables promus en dépit des soupçons qui pesaient sur eux et serait le chef d’orchestre de l’humiliation de Kaïs Saïed par des manifestants tunisiens devant l’ambassade Tunisienne à Paris à la rue Barbet de Jouy, lors d’une visite officielle en juin dernier.
Toutefois, le chef du gouvernement et ministre de l’Intérieur par intérim ne compte pas s’arrêter aux nominations, il s’est aventuré sur le terrain pour montrer que c’est bien lui le maître à bord. Au lendemain de la visite de Kaïs Saïed à la caserne de la Garde nationale d’Ettadhamen pour la rupture du jeûne, Mechichi s’est rendu à la caserne de Bouchoucha pour imiter son ennemi juré. Cette guerre acharnée entre les deux têtes de l’exécutif finira par faire couler le pays. Pitoyable.