Le rituel est immuable, répété dans une précision de grand horloger depuis plus d’une quarantaine d’années… Comme son parrain et maître des céans, Mohamed Benaïssa, le festival d’Assilah n’a pas pris une seule ride… malgré la profusion de festivals et de rencontres qui sont éclos ici et là dans le royaume chérifien, le « Moussem » comme l’appellent affectueusement ses habitués intellectuels et politiques-et ils sont nombreux-, est loin d’être passé de mode. Chaque année et même si de plus en plus les moyens manquent, le festival d’Assilah est le lieu de prédilection de rencontre entre les intellectuels et les décideurs des pays du Golfe, de l’Amérique Latine et de l’Afrique. Tous viennent et reviennent religieusement, dans cette petite bourgade devenue immense ville de culture, pour un pèlerinage…pour se ressourcer et se retrouver afin de diverger sur les sujets les plus sensibles du moment.
Derrière cette prouesse se dresse du haut de ses 82 ans, un homme de culture et de diplomatie. Un citoyen du monde, mais un fou amoureux d’Assilah. Un homme qui a tout le long de sa carrière déployé des trésors de patience et de savoir-faire pour que le festival, son festival reste en vie et qu’il fasse exister une petite ville qui se noyait dans les flots de l’Atlantique entre Tanger la cosmopolite et Rabat la snobe. Aujourd’hui, et malgré les difficultés financières, la concurrence acharnée et les jalousies recuites, le festival d’Assilah triomphe des vicissitudes mondaines et des lassitudes de l’âge… il refuse de rendre l’âme en redonnant lors de chaque nouvelle édition une nouveau souffle à la culture et au débat.
Ainsi, que ce soit dans les salons du sublime palais Raïssouni, de l’imposante bibliothèque, don du prince Bandar Bin Soltane, du Centre Hassan II des rencontres, offert par le Sultane Qabus ou des murs de la kasbah joliment peints par des centaines d’artistes plasticiens, une certaine idée de la culture vit… grâce aux écrivains, aux poètes et aux penseurs qui répondent fidèlement présents à chaque édition…grâce aux présidents, aux princes et aux diplomates qui s’y rendent simplement départis de leurs tires et de leurs fonctions…grâce enfin au combat sans relâche de l’enfant de la ville pour qui le Moussem d’Assilah n’est pas seulement un événement, mais un patrimoine national et mondial.