Par Ilyas Aribi
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La Kabylie, cœur de la révolte populaire, à savoir le Hirak en 2019, dont plusieurs de ses grandes figures sont issues, ont fait l’objet durant toute l’année 2024 d’une répression particulièrement féroce menée tambour battant par le Pouvoir Algérien qui refuse de faire marche arrière en ce qui concerne cette politique brutale à l’égard de tous les activistes et mouvements politiques opposants originaires ou domiciliés en Kabylie.
Plusieurs militants en Kabylie, particulièrement à Bejaïa, ont subi tout au long de cette année 2024 un harcèlement permanent des autorités avec des convocations répétitives et sont également les cibles d’arrestation pendant les dates commémoratives de faits historiques. En 2023, la députée française Valérie Boyer (Bouches-du-Rhônes -Les Républicains), attirait l’attention de Madame la ministre de l’Europe et des affaires étrangères en France sur les atteintes aux droits de l’homme en Algérie, notamment envers la population kabyle, à l’occasion de la question écrite n°07522 -16ème législature. Invoquant la réforme du code pénal algérien et l’extension de son article 87 bis sur le terrorisme, ainsi que le classement comme organisation terroriste du MAK en 2021, elle affirmait que, selon les associations kabyles, plus de 500 kabyles (poètes, écrivains, journalistes, militants associatifs…) étaient emprisonnés ou “faussement” accusés de terrorisme.
Au sein de sa question écrite, elle rappelait que “des franco-kabyles responsables d’associations et militants pour la culture kabyle ont été retenus dans les aéroports algériens”, de manière régulière. Des milliers de familles kabyles ne peuvent plus revenir pour retrouver leur proche24”, comme pour la quasi majorité des algériens, comme nous l’expliquions précédemment. En 2022, le président du MAK est condamné à l’emprisonnement à perpétuité alors qu’il est en exil en France, pour cette députée, cette condamnation s’inscrit dans la répression que subissent les militants pacifiques de Kabylie de la part des autorités algériennes. Selon la députée, certains sont emprisonnés pour “avoir participé à des rassemblements pacifiques, d’autres pour leurs écrits sur les réseaux sociaux ou encore pour le port du drapeau kabyle ou amazighe”.
En juin 2024, Aksel Bellabbaci, l’un des principaux responsables du MAK, était placé en garde à vue en France à la demande du pouvoir algérien, à la suite d’un mandat d’arrêt international. Convoqué par un commissariat en France, il avait été notifié du mandat d’arrêt émis à son encontre, l’accusant d’être le commanditaire des feux de forêt de l’été 2021. Placé en garde à vue, il a été relâché le lendemain. Au delà du cas du responsable du MAK, de nombreux militants ou activistes sont aujourd’hui arrêtés sur la base de l’article 87 bis du Code pénal pour “terrorisme” mais sont en réalité poursuivis pour des liens supposés avec le MAK, non vérifiés, ou encore antérieur à sa classification comme entitée terroriste. C’est le cas du journaliste Mohand Taferka ou encore de la coprésidente du congrès mondial amazighe Kamira Nait Sid.
La veille du 22 février, le militant de Bejaïa Malek Sebahi et l’ex- détenu d’opinion, ancien policier, Zahir Moulaoui, ont été placés en garde à vue, dans un commissariat à Béjaïa. Ils ont été présentés le 22 février, date de l’anniversaire du Hirak, devant le parquet près du tribunal de Béjaïa. Le journaliste Merzoug Touati, propriétaire du site « Elhogra.com », a été arrêté le 22 février devant le tribunal de Bejaia et remis en liberté, après avoir été retenu au commissariat de Béjaïa pendant quelques heures. Il s’était déplacé pour couvrir le procès des militants Zahir Moualoui et Malek Sebahi.
A l’approche du 20 avril, date commémorative du double anniversaire du printemps berbère 1980 et du printemps noir 2001, neuf militant de Bejaïa ont été convoqués un à un au commissariat respectif de leur région. Ils ont été interrogés, avec Procès-verbal, au sujet d’une photo de groupe, prise dans un café lors d’une soirée pendant le Ramadhan et partagé sur Facebook. Le 19 avril, l’ex-détenu d’opinion et ancien policier Zahir Moulaoui, ainsi que les militants Omar Ait Larbi, Samir Cherrat et Kamel Baghdad ont été placés en garde à vue. Ils ont été présentés, quelques jours plus tard, en comparution immédiate en compagnie des militants Malek Sebahi, Nadir Alitouche, Hamdour Hamza, Nadir Temine. Ils se sont vu condamner à des peines d’emprisonnement entre trois et six mois de prison (sans mandat de dépôt) pour « attroupement non armé » et « publication d’informations portant atteinte à l’unité nationale.
Il y a aussi le cas de l’activiste Bejaïa Omar Ait Larbi fait face à un harcèlement permanent en raison de son activisme. Il est convoqué plusieurs fois pour être auditionné avec PV. Le Tribunal de première instance d’Amizour, wilaya de Bejaïa, a prononcé, en avril, des peines de six mois de prison ferme, assorties d’amendes de 50 000 dinars lui dans deux affaires différentes. Il a également été placé en garde à vue le 11 février et remis en liberté après quatre jours. Tous ces cas sont symptomatiques d’une politique arbitraire exclusivement orientée vers la Kabylie. Une politique dont le seul but est de décapiter les cerveaux ou leaders de toute opposition potentiellement solide ou populaire vis-à-vis du pouvoir Algérien. Et tous les éléments réunis pour le moment indiquent que cette politique répressive risque de se poursuivre encore et toujours en 2025.