« En Libye, Emmanuel Macron s’est fait avoir comme un bleu ». Dans la bouche dans cet ancien diplomate français, ce n’est pas de l’ironie que l’on ressent, mais de l’amertume. Engagée dans le conflit libyen auprès du maréchal Haftar, Paris a fini par perdre pied et tous ses gains diplomatiques.
En septembre 2019, l’homme fort de la Cyrénaïque, appuyé par la Russie, les Emirats Arabes Unis, l’Egypte et la France, se voyait déjà intronisé nouveau dictateur de la Libye. Dans son avancée vers Tripoli, Khalifa Haftar bénéficiait aussi bien du parapluie diplomatique de Paris que d’un bouclier militaire et financier assuré par Le Caire, Moscou et Abou Dhabi.
Mais c’était sans compter avec l’entrée en matière de la Turquie. Le 27 novembre 2019, le premier ministre du Gouvernement d’union nationale (GNA), Fayez Al-Sarraj s’empresse de signer un accord de défense avec Ankara. Menacé par l’offensive des troupes du maréchal Haftar, le GNA ouvre grand les portes devant l’armée et les services turcs. C’est alors, que Recep Erdogan contacte son homologue russe. Vladimir Poutine, qui jusque-là soutenait Khalifa Haftar à travers les mercenaires de Wagner Group, ordonnent à ce groupe de combattants de lever le pied. C’est alors que commence la déconvenue de l’armée nationale libyenne qui perd une sur villes et localités à l’Ouest du pays. Bizarrement, les Russes ne s’en offusquent pas outre-mesure et laissent les Turcs mener leur contre-offensive en toute tranquillité.
La France, malgré quelques gesticulations inefficaces, est soudainement hors-jeu. Paris rouspète, dénonce et menace. Mais sur le terrain, c’est une nouvelle alliance qui semble voir le jour. Selon Christopher Nixon Cox, petit-fils du président Nixon et administrateur de la Fondation Richard Nixon, les intérêts d’Erdogan et de Poutine convergent en Libye. Pour les deux hommes, il faut coûte que coûte « chasser » les français de la Libye et affaiblir les émiratis. « Haftar n’a jamais eu la confiance des Russes en raison de sa double nationalité américaine », nous affirme un diplomate arabe.
Aujourd’hui, Emmanuel Macron, qui ne rate aucune occasion pour pointer du doigt Recep Erdogan et son ingérence en Libye, commence à lâcher lui aussi le maréchal Haftar. Lors d’une rencontre, le lundi 29 juin, avec la chancelière Angela Merkel, le président français a nié tout appui à Khalifa Haftar et a assuré ne pas avoir cautionné son offensive contre Tripoli. Il a aussi vilipendé Ankara, qui selon lui, importe massivement des djihadistes depuis la Syrie.
« Encore une fois Macron est victime de ses contradictions. Pendant de longs mois, le chef d’Etat français a fermé les yeux sur les ingérences des Emirats et de l’Egypte. Il a regardé ailleurs quand les mercenaires tchadiens et soudanais affluaient en Libye sous protection égyptienne », souligne un acine ministre français. En effet, l’alignement de la diplomatie française sur les positions d’Abou Dhabi et du Caire, gros clients d’armements français, ôte à Paris toute latitude pour être aujourd’hui influente en Libye.
Cheh…